jeudi 29 octobre 2015

Notre petite sœur

Hirokazu Kore-eda
Trois sœurs vont à la campagne aux obsèques de leur père et en reviennent avec leur 1/2  sœur inconnue. Le film raconte l'adaptation de chacune au nouvel équilibre, et comment se tisse le quotidien de la fratrie recomposée. La grande vieille maison est le creuset de l'identité familiale à laquelle Suzu (la petite sœur) est conviée. Il y a la cuisine, les recettes, les repas, les rites familiaux, l'alcool de prune, l'autel des ancêtres, les photos de famille... Il y a aussi le monde extérieur : les relations à l'école, au boulot, les sorties. Et par touches subtiles, en filigrane, affleure ce qui les perturbe l'une ou l'autre : souvenirs du père, de son absence, de sa maladie, le rôle des mères, la culpabilité, la honte, la difficulté à entretenir une liaison durable ou passagère... Ce foyer, c'est la bulle idéale, l'ancrage qui les protège, les rend attentives à ce qui les unit, et à ce qu'il y a de beau dans le monde. Ces filles polies et jolies, sensibles l'une à l'autre, c'est trop beau pour être vrai, mièvre disent certaines critiques... moi, je suis complètement sous le charme de ce film simple et lumineux comme les cerisiers en fleurs.



samedi 24 octobre 2015

Il a du chien

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A l'OFFICIELLE, exposé par galerie Kromus + Zinc

mardi 20 octobre 2015

Vers l'autre rive

Kiyoshi Kurosawa
Une très belle narration-rêverie sur lavie-lamour-lamort (ça ressemble à un cliché), mais comment rendre compte de la profondeur et de la légèreté de ce film qui avance sur la pointe des pieds, à la limite du sensible, et montre les relations entre les êtres, ce qui les relie au monde, comment ils s'en détachent. Ce qui est profond en dessous du blabla, sans qu'il y ait aucun blabla.
La femme est prof de piano. Elle vit seule, dans l'absence de son mari disparu. Et ce mari revient, surgi de nulle part, comme s'il était vivant. Le dialogue entre le mari et la femme reprend. Ou continue. Le film raconte leur étonnante pérégrination dans un Japon rural (authentique ?). Comme s'ils visitaient ensemble l'absence du mari. Comme pour  renouer avec l'évidente simplicité de la vie. Le simple fait d'être ensemble. Sur un fil ténu entre mirage et réalité, on apprend que le mari s'est noyé, il est donc une âme en peine, lui aussi en errance. Tout comme sa femme erre dans les décombres de son couple, dévastée par cette disparition. Il y a une très belle scène où elle se réveille, le mari revenu a disparu à nouveau, tout est mort autour d'elle, fané, cassé. Alors qu'elle baignait dans la chaleur d'une scène familiale, une vie authentique chez un couple d'aubergistes où le mari -qui était apparemment un intello urbain- faisait la cuisine. Et il la faisait bien. Dans une autre scène, à la campagne, une villageoise est empoisonnée par l'esprit de son mari qui ne veut pas lâcher prise. Il traîne du côté du passage entre les vivants et les morts et tente de s'agripper aux vivants.
La pérégrination du couple comble les vides et les mystères de l'absence, et les conduit là où le mari a disparu. Vers la possibilité, ou pas, de lâcher prise. La possibilité d'une autre rive.

mercredi 7 octobre 2015

Youth

Paolo Sorrentino.
Une merveille de promenade onirique dans une établissement thermal chic, en Suisse, des lieux étranges, des situations qui prennent une couleur étrange. Ecart propice à l'évasion poétique, l'hypothèse, l'interprétation, l'élévation. Ce film absolument profond est d'une merveilleuse légèreté, il charme, il séduit, il envoûte. Deux vieux amis (magnifiques acteurs, mais tous les acteurs sont magnifiques dans ce film) parlent de leur vie en général et de leur prostate en particulier, et dans l'intervalle, toutes les distances sont possibles pour regarder le monde : avec humour, avec émotion, avec drôlerie, avec cynisme, avec cruauté, avec distance ou de tout près. Ça donne une galerie de portraits et de facettes parfaitement réjouissantes, charnelles, sensibles, émouvantes, grotesques. Les chorégraphies de la masseuse, la théorie des baigneurs, la sinistrose des salles à manger de palace, les corridors et les espaces du palace, le professeur d'alpinisme, la miss Univers, l'émissaire de la reine... Les personnages surgissent, disparaissent, réapparaissent pour brosser une vision du monde en éclats et facettes, avec toujours ce talent d'éviter le lieu commun pour  montrer le potentiel d'un moment, la densité d'un échange, l'étrangeté d'un comportement, l'émotion ou la vérité d'un instant ou d'une parole. C'est un film aérien sur la lévitation, une interrogation sur l'épaisseur de la vie, sa fugacité et sa légèreté.