vendredi 30 mars 2018

Artistes à Suivre dans la Haute-Vallée de l’Aude.

Deux bonnes raisons de les découvrir l’un par l’autre : Artistes à suivre, ce sont des artistes contemporains qui exposent dans des « galeries éphémères » pendant 4 jours pendant le week-end de l’Ascension. Ce sera la 10ème édition cette année, et la manifestation monte en puissance avec en moyenne une cinquantaine d'artistes exposés chaque année. Ils seront 71 en 2018 (du jeudi 10 au dimanche 13 mai).

Comment ça marche ? Avec le concours des habitants et des communes qui installent des galeries éphémères : chez eux, dans des granges, des hangars, des lieux communaux...  pour y exposer peinture, dessin, gravure, sculpture, céramique, photographie, vidéo, installation... Il y a 3 à 10 lieux d'exposition par commune.

Artistes à  suivre invite à pérégriner de village en village pour découvrir ces artistes ; cette année, les 11 villages qui se prêtent au jeu sont : Alet-les-Bains, Bugarach, Cassaignes, Couiza, Fa, Granes, Peyrolles, Quillan, Rouvenac, St-Jean-de-Paracol, Serres, tous dans la Haute-Vallée de l’Aude.


C’est loin (de Paris), mais c’est près de Carcassonne, pour passer un très bon moment à découvrir de l’art contemporain en roue libre, et les artistes qui vont avec (ils sont présents dans leurs galeries éphémères) dans des paysages magnifiques, et les villages qui vont avec.

L'inauguration aura lieu à l’Abbaye d’Alet-les-Bains (magnifiquement ruinée), le mercredi 9 mai à 18h30, avec exposition du « Florilège » : c'est l'exposition-résumé qui présente une œuvre pour chacun des artistes présents à Artistes à Suivre, pour donner un aperçu de l’événement.
A vrai dire, pour l'avoir pratiqué l'année dernière, le Florilège est assez fouillis et ne donne pas idée de la qualité de ce que l'on peut découvrir après, en visitant les galeries éphémères. Mais c'est le lancement de la manifestation, et ça vaut quand même la peine. Et Alet-les-Bains est une jolie commune.

Bref, Artistes à Suivre, c’est de l’art contemporain en grande ruralité, ni marché de l’art, ni salon d’artistes locaux. Ce sont des découvertes et des rencontres dans une ambiance très agréable, avec aussi des restaurants et des buvettes éphémères, tenues par les locaux. Les artistes viennent de toute la France (et un peu d'ailleurs).

Les organisatrices :
Caty Pech 06 74 52 24 71 catypec@wanadoo.fr
Victoria Milroy 04 68 74 17 13 artistesasuivre@gmail.com

https://www.facebook.com/Artistes-%C3%A0-Suivre-179259415456951/

Pour les amateurs, le Sentier Cathare passe par là : http://randopyrenees.com/rando-pyrenees/le-sentier-cathare-gr-367
Et pas loin, il y a Limoux, avec quelques belles productions de blanquette, mais pas seulement, et oui, le mousseux peut être bon).




lundi 26 mars 2018

Mektoub my love

Est-ce qu'il faut se dire que Kechiche est un oriental (?) et que le temps n'a pas la même valeur pour lui. Ou est-ce que c'est mortellement long ? Est-ce qu'on peut supporter à l'infini les bavardages, dragouillages, ce temps interminable que les gens passent à faire du bruit dans un café, sur le trottoir ou à la plage, à décider s'ils feront ceci ou cela, s'ils iront ici ou là. Est-ce qu'on a envie de voir (longtemps et souvent) des jeunes se tourner autour, se toucher, s'allumer, (et un gros dragueur flirter avec une fraîcheur, gentiment allumeuse, mais pas vraiment consentante), des gens qui s'amusent à tenter leur chance et à se repousser gentiment tout en laissant venir. Est-ce qu'on a envie de subir au cinéma ce qu'on ne supporte pas en vrai, la lenteur de la vie, l'indécision, le fouillis des relations d'une bande, l'ennui et le bruit du groupe. C'est ça le film de Kechiche, le temps qui passe, une bande de copains, la famille qui va avec, les jeunes qui se draguent, s'amusent, se séduisent. C'est comme la vie, destructuré, ça manque de direction et de synthèse. Donc, c'est interminable et (assez chiant). Mais, le blabla, le bâton rompu, le "sur le vif" est remarquable de fraîcheur et de vérité. Les personnages, les situations sont parfaitement cernés. Les portraits de femmes sont magnifiques. Les mamas, tatas, cousines etc. Les actrices sont formidables. Tout est formidablement juste. Et formidablement long.
Sinon, il y a ce qui me gêne toujours chez Kechiche, cette insistance à la limite du voyeurisme à filmer les corps et les culs. La scène du début est très belle. Ophélie et Toni font l'amour et on sent que ça se passe très bien, après, on voit la jeune femme épanouie (son beau derrière aussi) et manifestement repue et c'est remarquable de réussir cette scène. Mais... Un tout petit peu trop ? On se sent voyeur, comme Amin d'ailleurs, troublé et voyeur. Mettons ça au crédit du metteur en scène. Mais après ? Cette profusion de plans cul, l'insistance avec laquelle il nous en met plein la vue. Comme s'il s'attaquait au vieux fond mateur que tout un chacun (homme et femme) nourrit sournoisement.
Allez, les hypocrites, matez et matez encore ces beaux culs à moitié nus qui ondulent sur la plage, qui se juchent sur les épaules des garçons pour des joutes dans la mer, le sex appeal de ces culs qui ondulent dans la danse, affichent le désir, offrent sans offrir. Les filles s'affirment, les garçons tournent autour, on prend, on donne... Et la naïve de service tombe malheureusement amoureuse. Aïe. Où finit le plan cul, où commence... quoi ?
A la scène dans la boîte, ça devient gênant, Ophélie accrochée à la barre à laquelle elle s'enlace, fait tournoyer son cul façon go go dancer. Hem. A l'ère du #balancetonporc et de la dénonciation de la femme-objet, on est franchement off-limites. Et on retrouve un agacement certain devant la manie qu'a Kechiche de se (nous) rincer l'oeil, sous prétexte de faire du cinema.
Mais bon, il réussit aussi des scènes magiques, comme la naissance de l'agneau. Et là, pour une fois, enfin, c'est l'émotion et le silence. Chut, pas de bruit dans un film qui filme le bruit, justement. Le bruit des gens.

vendredi 23 mars 2018

Ceija Stojka, La Maison rouge


Cest l'histoire d'une Rom d'Autriche. Elle se met à peindre en 1988, des décennies après que sa famille, comme les Roms, a été traquée par les nazis et enfermée d'abord à Auschwitz-Birkenau, Ravensbrück, Bergen-Belsen.
L'exposition montre d'abord la vie d'avant, en roulotte sur les chemins. Une vie harmonieuse.
Puis l'expérience des camps par une très jeune fille (elle a 10 ans). Là, c'est une marée d'impressions, de souvenirs, de témoignages de la survie dans les camps. Les images sont chargées, multiples, complexes comme les cauchemars, elles racontent une histoire sans chronologie, avec des surimpressions, c'est la complexité des émotions et des  expériences vécues par la jeune fille, la peur, la violence, la douleur, la faim, l'horreur, ce qui assaille encore sa mémoire et toute l'expérience de son existence.
C'est rare de rencontrer une œuvre aussi puissante, prenante, bouleversante. C'est un coup de poing au cœur, elle met en image l'innommable, et les images qu'elle produit ont plus de force que tous les mots qu'on a pu lire sur l'extermination et la survie dans les camps.☆
Au delà de l'oeuvre d'art, c'est l'exposition d'une âme, comme ces écorchés de Rembrandt ou de Soutine, et en plus, cette femme a une manière d'écrire extraordinairement simple et puissante à la fois.
La peinture ci-dessus, c'est après, il y a à nouveau la nature, d'une puissance extraordinaire, mais il y a aussi ces oiseaux, comme les âmes de tous ces morts qui accompagnent toute l'exposition et toute son âme, pour l'éternité.
"Toujours quand je reviens à Bergen-Belsen, c'est comme une fête ! Les morts volent dans un bruissement d'ailes. Ils sortent, ils remuent, je les sens, ils chantent, et le ciel est rempli d'oiseaux."

http://lamaisonrouge.org/fr/la-maison-rouge/

☆ C'est plus complexe, plus dense, plus riche, plus puissant que la parole ou que l'écrit

La vie d'avant, sur les routes 
La photo ne rend pas hommage à  cette vision du camp



Tout nous était interdit dans cette société, sauf de mourir. Et c'était à nous de savoir ce qu'on allait en faire de ce peu de vie, si on allait mourir ou lutter.
Ceija Stojka

samedi 17 mars 2018

Call me by your name/Appelle moi par mon nom

Luca Guadagnino. Une très  jolie daube : c'est convenu et gnangnan, chichiteux et maniéré. Terriblement artificiel. Dès les premiers plans, on s'attend au pire. La maison est parfaite, les parents sont parfaits, les gens de maison sont parfaits (Mafalda et Anchise, so chic), la décoration est parfaite, la cuisine est parfaite, les repas sur la terrasse sont parfaits, la piscine est parfaite, les vélos sont parfaits, la ville est sous ses meilleurs angles etc... Le jeune Elio est très convaincant (Thimothée Chalamet) : joli garcon, et un registre intelligent. Ce n'est pas le cas de l'étudiant américain, bellâtre caricatural dans la catégorie surfeur californien à mèche blonde impeccable, tellement sportif, tellement "nature", tellement too much, à l'américaine, qui fait irruption chez ces prototypes parfaits de bourgeois intello tellement cools et sympas, et tellement riches.
L'histoire avance avec une minutie conventionnelle, passablement ennuyeuse, même si c'est assez bien vu. Les émois adolescents, les filles, les garçons, la libido froleuse, les maladresses, les évitements, étreintes, dépucelages, baignades nocturnes... Une constante impression de déjà vu, si ce n'est que les émois amoureux touchent finalement/aussi les 2 garçons. C'est censé être bouleversant, c'est long, lent et ennuyeux. Et la copine de Thimothée aussi est parfaite.
Sauf l'étonnant dialogue du père avec son fils, à la fin. Chapeau, le père capable d'avoir une telle discussion avec son fils, capable de s'approprier l'expérience de son fils pour lui donner une (belle) leçon de vie. Et le fils capable d'entendre ça de son père. Comme s'il n'y avait entre eux ni barrière, ni retenue, ni gêne, ni pudeur. Trop beau pour être vrai.
Ps : les photos d'éphèbes de la statuaire grecque (au générique + au milieu du film) sont très belles/beaux. Ah oui, parce qu'on a aussi droit à la séquence "fouilles" et à l'émotion de sortir du lac une statue immergée depuis un naufrage, donc petite séquence didactique sur la statuaire de ces pédés d'Athéniens. Donc, ça va, on a la caution de l'Antiquité.

lundi 12 mars 2018

Émile Guimet et Félix Regamey en Asie

Une des peintures "photographiques" de Félix Regamey


Ouf il était temps, vu tout à fait par hasard le dernier jour de cette expo qui a beaucoup de charme et est pleine de curiosités. Une incursion très plaisante dans le voyage extraordinaire du curieux-savant-collecteur et du peintre.

http://www.guimet.fr/event/enquetes-vagabondes-le-voyage-illustre-demile-guimet-en-asie/

Des États-Unis au Japon et de la Chine à l’Inde, l’exposition évoque l’extraordinaire voyage d’Émile Guimet accompagné du peintre et illustrateur Félix Régamey.
En 1876, Émile Guimet (1838-1918), fils d’industriel lyonnais, retrouve aux États-Unis le peintre Félix Régamey ,communard et dessinateur de presse, (1844-1907)... rencontré quatre ans plus tôt. Tous deux entament alors un voyage au long-cour, décisif pour l’histoire du musée, qui va les conduire au Japon, en Chine, en Asie du Sud-Est, puis en Inde avant de retrouver l’Europe. Lors des différentes étapes, Guimet se renseigne auprès des érudits dans le cadre de son enquête sur les religions d’Extrême-Orient. Ces recherches l’amèneront à créer un musée pour lequel il acquiert de nombreux objets. À ses cotés, Régamey dessine des esquisses, un long travail à partir duquel, de retour en France, il réalisera de nombreuses œuvres à sujet asiatique.
Cf évocation de leur pavillon ( ?) à l'exposition Universelle de 1878 
une sélection de peintures, toiles grand format, photographies, dessins, objets personnels, échanges épistolaires. ..
« dix mois qui éclaireront tout le reste de nos vies ».

dimanche 11 mars 2018

Georges Michel, Le Paysage sublime



https://www.fondationcustodia.fr/Georges-Michel

Merci l'affiche du métro, c'est comme ça que j'ai  découvert Georges Michel, qui peignait quand les faubourgs jouxtaient encore la campagne.
Beau contrepoint aux paysages français de la BNF, balafrés de centres commerciaux, barres d'immeubles, voies express et autres stations service.
Mais l'essentiel, c'est que ce peintre est génial. Merci à la Fondation Custodia de le faire découvrir.






Willem von Swannenburgh










dimanche 4 mars 2018

Phantom thread

Paul Thomas Anderson.
Est-ce que ce film est trop parfait ? Pas un fil qui dépasse, forcément, c'est de la haute couture, et tout ce qui s'y rapporte est a priori assez prévisible : l'ambiance quasi religieuse des ateliers de couture, la déférence absolue de tout le personnel, la cinglante sister et gardienne du foyer, puisque le foyer, c'est la maison de couture, et le défilé des clientes à la fois soumises au maître et donneuses d'ordre. Parfaite aussi la peinture du génie, Reynolds Woodcock (Daniel Day-Lewis) constamment relié à sa pulsion créative, au fil de son inspiration, le phantom thread qu'il ne faut rompre sous aucun prétexte, sous peine de disgrâce, bannissement, punition. Croquer des toasts au petit-dejeuner relève du crime de lèse-majesté. Ce que la sister ne manque pas de noter d'un oeil gourmand. Alma court à sa perte, comme toutes celles qui l'ont précédée.
Rompre le fil, c'est pourtant à cela que s'emploie la belle Vicky Krieps, bêtement amoureuse du génie. Mais à le côtoyer, la jeune serveuse se dégrossit vite et se mettra à l'aimer beaucoup plus intelligemment, c'est à dire perversement. La muse déborde donc du cadre rigoureux où la confine Reynold Woodcock. Après une pitoyable tentative de dîner amoureux, bien trop banal, bien trop bourgeois, qui se solde par un cuisant échec, la belle passe à un stratagème autrement tordu pour nourrir son amour et tisser son fil. L'impeccable Daniel Day Lewis est soumis, charmé, lié. A folie, folie et demi. Cest leur lien invisible, puissant, tordu, viscéral.

Tout cela est magistralement administré, pas une fausse note, pas une faute de goût, mais il manque quelque chose. Cette folie, justement. Elle explosait dans le génial There Will be blood, elle reste ici trop intellectuelle, trop cadrée. Il manque quelque chose qui ressemblerait à de l'émotion ?

samedi 3 mars 2018

Lady bird

Ahlala encore une salve de critiques dithyrambiques pour un gentil petit film bien convenu, avec des séquences mille fois vues et revues sur l'ado américaine. 1ère demi-heure, on attend de voir, après, on a vu, et revu. Et on bout d'impatience que ce soit fini.
Il est vrai que l'actrice principale au nom imprononçable fait bien le job.

jeudi 1 mars 2018

Turbulences dans les Balkans, Halle Saint Pierre

Vojislav JAKIC, Dessin meurtrier 1973

http://www.hallesaintpierre.org/2017/09/04/turbulences-dans-les-balkans/

Comme toujours à la Halle Saint Pierre, une immersion dans des mondes touffus, étranges, complexes ou naïfs, un vrai voyage dans le mental d'artistes foisonnants et souvent passionnants.
Extrait du dossier de presse : "Mais ce sont les compositions torturées de Jakic, que l’artiste vivait non pas comme « un dessin ou une peinture, mais comme une sédimentation de douleur » qui nous plongent implacablement dans un monde archaïque, déstructurant dans le même temps nos logiques rationnelles."



Aleksandar Denic, Milan Stanisavljevic : turbulents




Des armées happées dans le combat comme des limailles de fer. Étrange dynamique des batailles


Sculptures puissantes, telluriques, comme des figures arrachées aux entrailles de quelque chose de très enfoui, venu d'une mémoire archaïque où l'homme, la terre et les légendes vivaient ensemble.
Milan Stanisavljevic




Ilija BOSILJ BASICEVIC


J'aime ces drôles de figures ondoyantes, sinueuses, qui ont l'air d'affirmer des légendes que je ne connais pas

Barladeanu dit ION B.


Série de collages  ****

Au rez-de-chaussée, une exposition consacrée à Caro et Jeunet :
A priori pas très tentée, même si j'aime beaucoup Delicatessen, mais on se laisse captiver à scruter tout ce making of de films que je n'ai as vus pour beaucoup. Ça m'a donné envie de voir La Cité des enfants perdus et quelques autres
avec "...des artistes emblématiques de la Halle Saint Pierre que Jeunet découvrit au fil de notre programmation : l’electromécanomaniaque Gilbert Peyre et son esthétique foraine, Ronan-Jim Sevellec et ses cabinets de curiosités miniature à l’élégance fanée ou encore Jéphan de Villiers et son petit peuple imaginaire nostalgique des civilisations perdues. Leurs œuvres et les objets « fétiches » des films des deux réalisateurs ne forment qu’un même monde ouvrant de nouvelles voies vers l’imaginaire. Dans ce monde onirique et fantastique..."

http://www.hallesaintpierre.org/2017/06/27/caro-jeunet/

Caro : 
« Si singulier il y a, il me semble que l’association bicéphale que nous avons constituée avec Jean-Pierre Jeunet fut l’une des choses les plus singulières du paysage cinématographique français. Deux cinéastes visuels qui renouent avec les origines du cinématographe…  Pour ma part, notre filiation revendiquée avec Meliès et l’art forain, trouve naturellement sa place à la Halle Saint Pierre qui a toujours su accueillir ceux qui marchent en dehors des clous… »