mercredi 30 mars 2011

Poetry et autres films 2010


Poetry, Lee Chang-Dong
Une femme lumineuse, élégante de corps et d'esprit, aérienne. Discrètement en décalage avec son environnement, où elle accomplit sagement ses tâches. La trivialité de l'existence la touche sans altérer sa clarté. Elle s'inscrit à un cours de poésie, parce qu'"elle aime les fleurs et dit des trucs bizarres". Parce que sa maîtresse lui avait dit qd elle était petite, qu'elle serait poète.
Subtil : ses relations avec le vieil homme dont elle s'occupe, son petit-fils, adolescent étanche et opaque dont rien ne filtre, les scènes avec les pères des adolescents, la scène du karaoké, le banquet des amis de la poésie, et la manière dont elle "piste" la trace, ou l'ombre de l'adolescente suicidée, tout comme elle piste les mots de la poésie. Son intégrité. Son regard neuf sur la beauté du monde.
Femmes du Caire.
Portraits de femmes, contrastés, profondes, humaines, chaleureuses, modestes ou privilégiées, elles sont toutes oppressées, sous la loi de l'homme. Ça dure plus de 2h, on ne voit pas le temps passer.

Dans ses yeux, Juan José Campanelle
Excellent. Un juge à la retraite (Esposito) repart sur la piste d'un violeur meurtrier, à travers sa "reconversion" dans l'écriture. Aller - retour il y a 25 ans, ses relations avec sa "chef" (Soledad Villamil, magnifique). Tous les personnages sont intéressants (son collègue alcoolique, le mari de la victime, le meurtrier, l'homme de pouvoir).

Inception, Christopher Nolan (21 août 2010)
Bien fait, scotchant, intelligent, quelques scène bluffantes, trop d'action (les "défenses" en font trop, ça fait basculer une idée intéressante dans une caricature façon Mission impossible). Des longueurs. (Juno - Ellen Page) est superbe.

Klller inside me Michael Winterbottom
Pénible. Bonne peinture de la ville et des caractères, intelligence du scénario et du psycho/sociopathe, la manière froide qu'il a de s'enfoncer dans sa folie en y entraînant les autres, sous les dehors d'une existence et d'une société américaine des années 50 des plus conformistes. Mais violence insupportable du tabassage des femmes. Ça met mal à l'aise (complaisant?)

Des Hommes et des dieux. Xavier Beauvois
Un film d'amour, d'ouverture, de don, d'oubli de soi. De fidélité à soi-même et à son devoir envers habitants du village. De droiture dans ses choix et dans sa voie. C'est un film sur l'intégrité. On s'élève dans la conscience humaine, à une altitude où l'on n'a pas l'habitude de respirer. Une pure vision du monde. Ces moines sont comme du cristal. Même s'ils ont peur et s'ils doutent.

The Radiant child
JM Basquiat. La (frénésie) créatrice du bonhomme, son appétit de création et de reconnaissance. Le moteur interne.

Biutiful Alejandro Gonzalez InarrituJavier
Plongée en dessous du seuil de pauvreté, à Barcelone, dans les réseaux clandestins - exploiteurs. Uxbal, (le beau Javier Bardem) est profondément humain (ses enfants, son ex, ses amis clandestins), donc, on est tout le temps ému ou choqué par l'horreur de leurs vies. Tellement humain qu'on en arrive à oublier à quel point il est compromis dans le boulot d'exploiteur de la misère humaine. Même s'il essaie, à sa manière, de les défendre. Et ses contacts avec l'esprit des morts ? là aussi, ambigüité : est-ce qu'il fait du bien, ou il exploite la crédulité des endeuillés ? Des belles scènes, des scènes poignantes, des efficaces (la boîte de nuit) qui posent la question : dans quel monde vivons-nous ? Mais un peu manip (trop, c'est trop)

Potiche, F Ozon
Sympathiquement convenu (C.Deneuve, pas si gourde qu'on croit)

Le soldat dieu, (japonais)
Atroce, too much, trop démonstratif, la femme est très bien. Soldat revient amputé des 4 membres, honoré comme un dieu par tout le village, mais le revers de la médaille : un sale type, sa femme, ligotée dans la convention sociale, mélange de haine et de dévouement

De vrais mensonges
Sympathique. Audrey Tautou et sa mère, quinqua dépressive, la fausse lettre...

J'en ai raté quelques uns...

lundi 28 mars 2011

A Serious man

Les frères Coen : c'est bien décapant. Rire grinçant. Le héros des certitudes mathématiques atomisé par les vicissitudes de l'existence, et des personnages qui ressemblent à des créatures de cauchemar, chacun englué dans le gros plan de sa propre existence : Madame et sa soif de refaire sa vie, le crétin pontifiant qui l'emballe, une fille bornée à des problèmes de shampooing et de nez, un fils qui plane, un frère parasite avec des problèmes de kyste et de martingale... Les situations sont à la limite du tolérable, le héros au bord de l'implosion, et le vide des réponses rabbiniques est sidéral.
A force d'être hyperréaliste, comme vu par un entomologiste qui aurait fumé la moquette, le tout donne une curieuse impression de distorsion de la réalité ? Presque fantasmatique. Peut-être parce que ça commence sous l'égide d'un conte du shtetl sur l'indécidable. Pourquoi ça m'a fait penser à Barton Fink ? Peut-être les cauchemars dans une chambre d'hôtel glauque ? (Au passage, tous les personnages féminins sont consternants, sauf peut-être la séductrice).