mercredi 27 janvier 2010

La Merditude des choses

Contes de l'Age d'or, Miungiu, roumain : drôle et caustique (3 films : L'école de campagne, Le cochon et ?)

La Merditude des choses, Felix van Groeningen, m'estomaque. Ce monde frénétique, bordélique, alcoolique, primaire, brut de décoffrage, tribal, épidermique, un monde à la dérive, et une manière de dériver en famille. Un monde clos et plein, plein de bruit et d'alcool, borné aux limites du patelin - principalement au bistro local - étanche au reste, et un sens dépravé d'appartenance à ce monde merdique, qui se suffit à soi-même, et emmerde le reste du monde. C'est plein de regards sur un tas de choses (la sociabilité alcoolique, le sexe, l''école, la paternité, sa cousine, les p'tits boulots... la misère humaine noyée dans le désordre... et l'étrange lien entre ces gens, l'esprit de clan qui les habite, et le fait d'en être ou de ne pas en être : être un Strobbe ou ne pas être. D'après le best-seller de Dimitri Verhulst.

Paris




Au fond, les ex-
Grands Magasins
Dufayel.

Passage Cottin,
vers la rue Ramey.

La Scuola dell'Attore

Soleil













Le soleil se montre à 9h35, on gèle à -5°cAjouter une imageAjouter une image.


mardi 26 janvier 2010

Titien Tintoret Véronèse : Rivalités à Venise


4 janvier, dernier jour de l'expo Titien Tintoret Véronèse. Il était temps. Hum, grand spectacle de la peinture. Des effets de chairs, de tentures, de tissus, des mythologies, des nuées, de l'emphase. C'est théâtral, parfois sublime, peuplé de figures altières ou musculeuses, et de femmes somptueuses.
Esther évanouie aux marches du trône, toute abandonnée, est tout à fait charmante, (Tintoret, prêté par la reine d'Angleterre), Assuerus ne s'y trompe pas, il s'est levé d'un bond pour l'assister,  l'émoi de la cour se voit dans le chatoiement des costumes, des gorges et des bras nus, des coiffures compliquées...
Encore du grand spectacle, encore une grappe de personnages en émoi, bruissant d'étoffes et de murmures stupéfaits autour du Christ qui vient de guérir une blonde toute en langueur, (Christ guérissant... Véronèse, Londres) soutenue par ses amies, pendant qu'une autre femme, retenant sa manche de glisser, se penche gracieusement sur l'épaule du Christ pour voir, elle aussi, le miracle. Un amour aux fesses nues est à moitié enfoui dans ses étoffes, le tout se joue dans la lumière de pastels un peu mièvres, rose et amande, bleu ciel et lilas, ocre orangé... Le Christ est "ailleurs", légèrement allumé par son auréole, au contact des instances célestes
D'incroyables Pélerins d'Emmaüs : ceux de Titien sont conformes, sobres, retenus, spirituels (?) tandis que ceux de Véronèse participent au capharnaüm d'un étonnant banquet mondain, où il y a des enfants, des servantes et des chiens, et où personne ne regarde la même chose -chacun est ailleurs/absent -tandis que le Christ regarde le ciel, sous l'œil d'une vieille servante revêche. Chez ceux de Bassano, (plusieurs copies de l'œuvre), l'affaire divine est largement reléguée, à droite du tableau, par la scène de cuisine au premier plan.
La Dernière Cène de Tintoret : encore de l'émoi, chacun se regarde et se récrie, c'est un instantané, arrêt sur image, temps suspendu, chacun prend l'autre à témoin, proteste de son innocence. De dos, isolé, Judas cache ses deniers, à ses pieds, le chien et le chat s'expliquent.
La mort du Christ aussi est théâtrale, racontée avec noirceur et emphase, l'émoi des assistants, les froissements d'étoffes, l'inertie du corps mort. Dans la Déploration du Christ (Tintoret, AccademiaVenise) double inertie : Marie, symétriquement évanouie dans les bras de Marie-Madeleine (?), est aussi exsangue que son fils dont elle tient les doigts de pied froids dans sa main.
Il y a des St Jérôme à profusion (je préfère celui du Titien, lui aussi retenu, épuré, simplifié), un étrange Baptême du Christ dans la nuit, sinistre, angoissant, un non moins étrange Jardin des Oliviers, tout en noirceur, des portraits admirables, où la noblesse des figures ne le cède en rien à l'apparat de la représentation - pape, doge, amiral -(ah, les tissus, les armures, les coiffes, les airs sévères ou altiers). Le portrait de l'homme et son fils est plus réussi que celui de sa femme et de  sa fille. Dans la Tentation de Saint-Antoine (Véronèse, Caen), toute la lutte est concentrée entre un démon musculeux et le malheureux vieillard gisant dans ses étoffes.  En comparaison, la tentatrice penchée au dessus du saint, dont un seul sein est dévoilé, semble bien délicate, presque étrangère à la scène, juste un peu curieuse de découvrir la faille du saint homme dont elle griffe délicatement la paume de ses ongles, noirs et griffus, qui seuls trahissent la démone.
Ah les femmes ! C'est plein de femmes sensuelles, voluptueuses, charnelles. L'impudique Suzanne est surprise dans l'intimité de sa toilette dans son "jardin-paradis" de délices, riche de promesses sensuelles, sous l'œil concupiscent des deux vieillards lubriques...
Les femmes sont lascives, rêveuses (Danaé de Titien), ou calculatrices et pragmatiques (Danaé de Tintoret, à Lyon), alanguies, il y a au moins 6 tableaux de femmes alanguies, sinon voluptueuses, dont le vêtement tombe au bas des reins, découvre la naissance du pubis, la fourrure du vêtement confondue avec la naissance de la toison. Je préfère la Venus au miroir de Tititen, opulente, souveraine, tranquille dans la jouissance de sa beauté, à celle de Véronèse, à l'air fourbe et frelaté. Dans l'étonnant  Venus et l'Amour, (Sustris, Louvre), Venus attend Mars avec une tranquille impudeur et la complicité d'un amour fessu, et dans l'étonnant tableau du Respect, l'homme a l'air bien moins respectueux que préoccupé d'autre chose, pendant que la femme assoupie, l'air repu et gourmand, semble attendre un hommage. Et Lucrèce est toujours délicieuse sous les assaut de Tarquin,  ... les peintres semblent adorer ce sujet, représenté 5 ou 6 fois.

Je retiens : des couleurs, des étoffes, des matières, des lumières, des mouvements, de l'effroi, de l'action, des passions, le spectacle de l'humain observé, raconté, emphasé, inventé, héroïsé, dramatisé, commenté, illustré. C'est magnifique.

http://mini-site.louvre.fr/venise/fr/exposition/prologue.html

dimanche 24 janvier 2010

Films 2009

Frozen River :

chez les prolos à la frontière canadienne. Rencontre de la femme de 45 ans, larguée par son mari, et de l'Indienne, passablement rejetée de sa tribu. Leur association improbable, sur fond d'humanité mutuelle. C'est pas mal, il reste une impression de (densité du vécu)

Burn after reading (frères Coen)
sympathique histoire parodique d'espionnage, mention spéciale pour le personnage de Brad Pitt en crétin du fitness, la femme est drôlement brossée elle aussi. Agréable passe temps.

Les Noces rebelles, (Revolutionary road) Mendès
La description du milieu est parfaite, les disputes sont bien vues, les personnages satellites sont ok, avec une mention particulière pour le fou, mais c'est trop... (démonstratif ? la montée est trop rigoureusement exacte ?)
Travail !! de critique : P. Garnier, écrit dans Libération que 4 autres films, au moins (L’Homme au complet gris, Liaisons secrètes (Richard Quine, 1960), Demain est un autre jour (Douglas Sirk, 1956), Loin du paradis), ont mieux traité le sujet, et aussi un roman (Un bonheur parfait, de James Salter) qui était mieux que Revolutionary road. Que si John Frankenheimer l’avait filmé en 1962, on aurait vu ce qu'on aurait vu, et que Kate Winslet est une épouvantable manipulatrice qui a obligé son mari à le faire, ce film. Et qu'en plus, elle est stridente. Et que Di Caprio est affreusement mal choisi.
Moi je le trouve très convaincant en cadre inférieur middleclass et poupin. Et pourquoi il a pas dit, le critique, que ce film verrouille assez hermétiquement le sujet de l'enfermement, et qu'on ne sait pas ce qui aliène le plus ? La médiocrité de l'existence ou celle des aspirations sans objet ? Que ces poussées paroxystiques de haine conjugale qui se résolvent dans l'affection quotidienne sont bien vues. Que le mécanisme de l'aliénation générale et personnelle est efficacement administré, même si la démonstration est infligée de manière un peu systématique... démonstrative. D'où il ressort un léger ennui. On se prend à aspirer au dénouement, prévisible. Heureusement que le fou vient, de loin en loin, semer un peu de zizanie. Ça montre assez bien comment des humains ordinaires (elle en dur, et lui en mou, c'est le fou qui le dit) se débattent avec leur vie ordinaire.

Gran Torino
Clint Eastwood aux prises avec les petits voyous du quartier qui terrorisent ses voisins (famille asiatique Mong (?) Vieux, seul, pas commode, voire raciste, mais... etc. C'est bien foutu, bien raconté.

Twoo Lovers
bien. Un jeune homme mal à l'aise avec sa vie, une sorte de convalescent après une tentative de suicide, parce que son amour (sel, élan, sens à sa vie) est parti. Il traîne dans l'appartement de ses parents, prend ses médicaments. Portrait subtil des 3 protagonistes. Sollicitude inquiète. Le père, la mère, le fils, les interactions d'affection et de pesanteur. Il rencontre deux femmes en même temps, la voisine flashante, bandante, barje, et une aimable jeune fille sympathique, fiable, chaleureuse au bon profil d'épouse. Pendant tout le film, il avance sur une corde raide et on se demande de quel côté il va basculer.

Welcome, Philippe Lioret
Un Kurde à Calais, sa fiancée à Londres, le maître-nageur. Bien. Triste humanité.

Revanche, Götz Spielman, autrichien
Un prostituée et son ami échappent à la mafia, font un casse, un policier la tue, il se réfugie chez son grand père, voisin du policier et de sa femme...Bien. Bien vu.

Les Plages d'Agnès, Agnès Varda. Jolie promenade dans l'âme et les souvenirs d'une dame qui a vivement participé à l'air du temps.

Harvey Milk, Gus van Sant. Film-biographie (?), sur le personnage militant pour les droits homosexuels entre 1970 et 78. Passionnant comme une enquête, ambiance électrique de l'époque et insertion dans la machine politique, très bien rendu. Une époque où donner de l'espoir avait un écho. Echo, justement, Cœurs perdus en Atlantide, (Stephen King), retour sur les années soixante et suivantes. La première nouvelle est la plus intéressante, mais les autres (séquence fac, séquence post vietnam, séquence deuil) restituent une époque révolue, celle où la jeunesse prenait le pouvoir, ou pensait pouvoir le faire. Regard sur la période contemporaine, celle où l'adulte mûrissant ne peut que contempler ce monde perdu avec nostalgie. (Regarder toute les citations musicales qui émaillent le livre).

The Chaser, Hong-jin Na, coréen : j'ai entendu une jeune fille sortir de là en disant que c'était nul. Moi, j'ai bien aimé l'ambiance ville, les rues de Séoul, et j'ai été bien scotchée par l'enquête-poursuite du proxénète, assez haletant, la partie psychopathe est un peu trop crade, (interdit aux moins de 12 ans, j'irais bien jusqu'à 14) mais son comportement et le suspense pendant la garde -à-vue est intéressant, la peinture des flics et du maire est assez drôle, même si, tout de même (?), caricaturale. Bref, c'est un bon film dans son genre.
Tokyo Sonata, Kiyoshi Kurosawa : d'accord, tout le monde sait que ce n'est pas marrant d'être japonais, parce que les codes sont encore plus serrés, et les marges de manœuvre encore plus étroites. Mais quand même, j'aime bien la peinture de personnages ficelés, chacun à sa manière et selon ses moyens et que tout ça dérape. Le salary man, le plus ficelé et le plus convenu, aura droit à un dérapage émaillé d'épisodes sordides. Dérapage en forme de chute au fond d'une cuvette de chiotte. Sa femme est ficelée d'une manière plus intérieure, c'est normal, puisqu'elle est mère et femme d'intérieur et passe son temps, cela va de soi, à ranger son nid et nourrir ses hommes, fort peu reconnaissants, à vrai dire. Ce qui fait qu'elle s'offre un dérapage assez déjanté, délirant, parfaitement irréaliste, donc parfaitement bienvenu, et qu'elle est, l'espace d'un instant, riche de son permis de conduire, la plus libre des ficelées. Le fils aîné n'a pas perdu de temps pour rater quelques barreaux de l'échelle sociale, d'ailleurs, il est déjà trop vieux pour faire comme papa, alors en fait de dérapage, il s'offre un sacré saut dans le vide. Il reste les enfants, bien sûr, qui résistent comme ils peuvent à la mise en conformité, mais les pères les battent quand ils les choppent (le copain fugueur, rattrapé et battu par son père, le fils cadet, battu parce qu'il a choisi la voie interdite des leçons de piano, en dérapage contrôlé par l'art). Lui, au moins, il pourrait bien se libérer, la scène finale est magique, où chacun est soustrait, soulevé.

Oss 117, Rio ne répond plus Jean Dujardin toujours sympathique, mais c'est un peu lourd, il manque l'effet de surprise qu'il y avait dans Le Caire nid d'espions.

La Femme sans tête (Argentine) nullissime, d'un ennui mortel, la bourgeoise, son milieu, l'acccident, le rêve, le mensonge, le silence. En plus, l'image et la couleur sont crades.

Good Morning England : ambiance déjantée et personnages drolatiques du bateau radio. Bonne évocation de l'esprit libertaire, briseuse de carcan, de ces années. Bonne musique.

In the electric mist (Tavernier) : enquête sur l'assassinat d'une jeune femme, salement mutilée. Un équipe de tournage est dans le coin. Le réalisateur, son amie, le producteur lié au milieu, ses hommes de main, un cadavre venu d'un autre âge, le personnage du flic, (shérif) sa maison, sa femme et sa fille. Tous les personnages sont intéressants, l'ambiance est dense. Excellent.

Millenium, l'Homme qui n'aimait pas les femmes. Enquête sur la disparition d'une jeune fille 40 ans plus tôt, dans une famille du grand capital. Bien scotchant. Personnage original de la "rebelle". Le journaliste, homme mûr, rigueur, droiture, solidité.

Whatever if works, Woody Allen, sympathique, le bon vieux Woody Allen en vieux misanthrope pessimiste et acariâtre, et la jeune dinde du Mississipi, pas si dinde et bien joie.

Jeux de pouvoir, pourquoi pas. Sombre machination. Un député, sa maîtresse, son dossier sur la privatisation de services de l'armée, le journaliste (Russel Crow) et la jeune journaliste qui débrouillent les fils du complot. Solide.

Victoria, les jeunes années d'une reine. Jean-Marc Vallée. Critiques sévères (hagiographie etc) mais c'est pas mal (luttes de pouvoir avant la succession) puis manipulations politiques et entrée en scène d'Albert (le Belge). Historico-romantique, beaux décors.

Là-haut : sympathique histoire de rêves d'enfance, de vieux monsieur et de maison portée par des ballons. Lunettes pour la 3D.

Partir (Corsini). Daube avec la jolie K Scott-Thomas, mélo, encore plus chiant que la vie.

Un Prophète : (Jacques) Audiard. Très bien. Epaisseur des personnages, (les deux protagonistes principaux sont bluffants (Arestrup et ???) épaisseur de la prison, logique des enchaînements, implacable et en même temps sur le fil, plein de situations au bord de la rupture, où ça pourrait basculer dans un sens comme dans un autre. D'où la force du film, à la fois fatal, inéluctable et (à suspens).

Pas d'orchidées pour miss Blandish, Robert Aldrich.
Miss Blandish est kidnappée par le gang Grissom, mené par Ma, femme de tête malfaisante, son fils (Jim), psychopathe et débile, et des acolytes plus ou moins malfaisants ou crétins. Mais Jim tombe absolument amoureux de miss Blandish. Intéressante peinture d'idiot complexe, et de tous ces malfrats diversement brossés chacun dans son genre. La transformation de la gosse de riche, enfant gâtée en prisonnière condamnée à survivre. Tout ça dans un Kansas rural surchauffé.

Le Sacrifice
Andrei Roublev
Stalker
Solaris
Nostalghia
Le Miroir

Tu n'aimeras point, Einaym Pkuho : choc, violence, sobriété. L'irruption de la passion chez un boucher juif orthodoxe / intégriste. La peinture du milieu, du quartier, de la famille, et la perturbation occasionnée par la présence du jeune homme, propulsé apprenti-boucher, par la compassion du boucher, ou peut-être déjà, par une obscure curiosité pour ce jeune homme. En filigrane, la société briseuse d'aspirations individuelles (la jeune Sarah vouée à un mariage arrangé, alors qu'elle en aime un autre, qualifié de fainéant et de bon à rien). Les séquences à la Yeshiva (l'école talmudique ?). Le personnage du rabbin, assez mesuré, le boucher, profondément perturbé par cette passion dévastatrice. Les "nervis" fascisants qui veulent rétablir l'ordre.

Allemagne 09 13 courts métrages au cinéma L'Arlequin :
-Angela Schanelec, images du matin (ville, hôpital, campagne...)
-Dani Levy, Joshua (réalisateur du Führer ?) pessimiste, va chez le psy, qui lui donne une pilule aux effets bizarres... (son fils s'envole...)
-Fatih Akin : interview d'un jeune turc né en Allemagne, Murat Kurnaz, ex prisonnier à Guantanamo
-Nicolette Krebitz : la rencontre d'Ulrike Meinhof et Susan Sonntag
-Dominik Graf : la destruction des maisons comme destruction de la mémoire, remplacées par des bâtiments (neufs, standardisés, la "transparence" contre (?°
- La femme qui tourne un documentaire sur un centre d'aide sociale fréquenté par les gamins du quartier
- L'institutrice qui organise un débat pour résoudre les problèmes à l'école
-Hans Weingartner, "Gefährder" l'universitaire de gauche soupçonné d'appartenir à un groupe terroriste : les mesures préventives de flicage, mise en carte des données le concernant (ses 4000 contacts)
- L'entrepreneur qui ne supporte pas que son journal change (Frankfurter Allgemeine Zeitung)...
-Tom Tykwer, Feierlich voyage
-Romuald Karmakar, l'interview du patron de sexshop
-Wolfgang Becker (Goodbye Lenin), Krankes Haus : métaphore de l'économie malade, un mélange d'Urgences et de Dr House appliqué à l'économie en état de collapsus
-Christoph Hochhäusler… Séance : déménagement des terriens sur la lune et séances d'effacement de la mémoire (contre la nostalgie)

Comment vit-on en Allemagne aujourd'hui ? Plutôt mal : les petits matins sont blêmes, et les idées sont noires, mais on peut se soigner à coup d'ampoules aux effets bizarroïdes,
l'économie est en état de collapsus avancé et on détruit des quartiers entiers, au nom du modernisme et de la transparence, détruisant au passage la mémoire qui va avec. Le Frankfurter Allgemeine Zeitung a subi une intolérable atteinte, les intellectuels de gauche ne valent guère mieux que des terroristes, et les enfants ne sont pas épargnés : le quotidien de l'aide sociale ou des leçons de citoyennenté à l'école.
Et il y a des vieux à ne plus savoir qu'en faire
Et quand ça va bien, ça ne va pas mieux : cf la vie internationale et standardisée d'un robot-cadre de la mode.
C'est toujours sombre, parfois drôle, et parfaitement hétérogène. Une somme de regards qui renvoie à la noirceur du monde, à quelque chose d'irréversible dans la course du monde, à la perte globale de liberté et d'innocence (piqûre de rappel pour ceux qui auraient oublié que globalement comme en particulier, c'est la merde).

500 jours : aucun intérêt.
Plus tard : j'ai vraiment vu ce film ? J'ai eu beau regarder le synopsis sur Allociné. Rien à faire. Black-out complet.

Singularités d'une jeune fille blonde, Manuel de Oliveira : charme suranné, désuet, dans un monde clos, un jeune homme , une jeune fille à l'éventail, un regard, un coup de foudre, son attention focalisée, un obstacle (son oncle) une péripétie en forme d'épreuve (le renvoi, la galère, le séjour au Cap Vert, les difficultés aplanies, le rebondissement fatal, la résolution des problèmes, la demande en mariage, l'incident.)
Narration simple (minimaliste), leur relation aussi, minimaliste, tout est réduit à sa simple expression, reste l'importance du cadre (des cadres et cadrages : portes, fenêtre, codes sociaux (le magasin à l'ancienne, la sociabilité à l'ancienne, les usages en vigueur, )
et la narration dans le train.

Le Ruban Blanc, Michaël Hanecke
Violence des rapports sociaux, violence de la religion, violence des rapports humains. (Scène des verges derrière la porte, rupture du docteur avec sa maîtresse, extorsion par le pasteur de l'aveu du fils...)
Les images sont magnifiques : plan de la campagne par où arrive le médecin à cheval, la scène de fauchage, la décapitation des choux, la grange en flammes, les paysages d'hiver, la promenade en attelage des fiancés, les intérieurs (pasteur, baron, médecin, régisseur, paysan - la famille Felder), la toilette de la morte, la scène où l'enfant s'approche de la morte.
La loi domine, dans ce film : loi des pères, loi du pasteur, loi du maître, loi des hommes, et surtout, loi du silence. Dans ce monde, il convient d'obéir et se taire. Alors ce sont les faits qui parlent : une succession d'actes mauvais, violents, dont la source reste mystérieuse. Violence et soumission s'épanouissent dans ce monde archiclos : les enfants obéissent au père, les hommes obéissent au maître, les femmes obéissent aux hommes, mais les hommes obéissent aussi à leurs pulsions, et les enfants obéissent entre eux à des lois mystérieuses qui les conduisent à faire le mal, en secret, et cela en dépit (ou en raison) de l'excès de contrôle.
Curieusement, c'est l'antipathique baronne qui énonce (dénonce ?) l'enfermement de cette société de haine, bestialité, brutalité. Le dialogue sur la mort entre Rudi et sa grande sœur, la scène de rupture du docteur, la rhétorique du pasteur, les scènes chez les paysans... toutes ces séquences sont du matériau lourd, dense, qui enfonce davantage dans le désespoir, l'enfermement, la consternation, l'inexorabilité du mal présent et à venir. L'épisode de la Confirmation est extraordinaire : chacun est confirmé dans ce qu'il est dans le secret de son âme (y compris le mal qu'il fait - ou qui l'habite ?). Mais il y a aussi des scènes où le réalisateur communique la grâce : la rencontre entre l'instituteur et la jeune fille, le baiser dans l'attelage, l'oiseau blessé recueilli par le petit garçon... En fait, les seuls rescapés, ceux qui ont encore droit à l'innocence sont les tout petits (moins de 5 ans), Rudi, le petit frère à l'oiseau, éventuellement ceux qui sont étrangers à ce village (l'instituteur et la jeune fille). Mais tout ça n'est que broutille comparé à la guerre, la Grande, celle qui vient et va tout balayer. Car l'homme est toujours capable de faire pire.

Le Concert :
drôle, haletant, sympathique.

Avatar : grand spectacle. La nature est belle, tout le vivant est relié, et la pensée correcte.


mercredi 20 janvier 2010

Films 2008


Into the wild
, Sean Penn : j

eune phénix gâté par l’existence en quête d'absolu. Confronté à l’absolue nécessité de se dépouiller de tout ce qui est superflu pour aller à l’essentiel, sa vérité intime, le héros finit par se réduire en effet à l’essentiel : la seule, l’inexorable faim (et privé d’une autre chose essentielle : l’autre.)

Il brûle tous ses vaisseaux mais loupe l’étape renaissance.

Le beau voyage initiatique tourne court à cause de la fragilité de l’homme livré sans défense à la domination de la nature. Il s’est enfoncé trop profondément au cœur de lui-même et de la nature. Il est allé trop loin pour pouvoir revenir.

On en sort avec une impression d’amertume, parce qu’on aurait eu envie que ça marche.


Le barbier sanglant, Tim Burton : ambiance Londres, pas mal, déco aussi, mais trop c'est trop : trop de sang, de chant, d'outrance sur une trame de vengeance caricaturale.

No country for old men, Ethan et ... Coen :

Lwelley, chasseur solitaire (au fusil à lunettes), soudeur quand il travaille, mène une vie ordinaire avec sa copine, une fille sympa, dans un mobil home quelque part comme nulle part au Texas. Jusqu’à l’irruption d’un million de dollars dans sa vie. Pourchassé par un tueur psychopathe, ça donne n'importe quoi à toute vitesse dans un monde de fêlés. On voit des pick-up, les gens qui les conduisent, des flics, des mobil home, des stations-service, des parkings, des motels, des enseignes de motel, et pendant qu'on y est des tenanciers de motel, et des chambres de motel, des intérieurs médiocres, des routes vides, des paysages déserts, des petites villes pourries à pas d'heure, des drugstores, des feux de signalisation, des paysages ingrats, des valises de dollars, des personnages annexes qui défilent, vite et bien brossées avant qu'ils ne meurent, engloutis dans les poubelles d'une histoire compliquée. Tout ça dans la chaleur désertique du Texas ...


Juno, Jason Reitman : p

ortrait d’adolescents sur arrière plan d’Amérique moyenne : rencontre de 2 univers (milieu petit bourgeois sympa et bourgeois sup, sympas aussi). Regard tranquille, lucide : Juno et son copain, et sa famille, le planning familial, la famille adopteuse… Sonne juste, sans emphase, avec une certaine drôlerie.


Diary of the death, Romero : b

ien. Les morts-vivants font toujours recette quand ils traitent avec Romero. Tension efficace, regard intéressant sur le rôle des images et du point de vue. Assez haletant, avec l'idée du piège qui se referme de plus en plus.


My Father, my lord, israëlien, : u

ne famille orthodoxe (père rabbin, mère, fils 5 ou 6 ans). La passion dévastatrice de la religion. Glaçant.


Valse avec Bachir (Walz with Bachir), Ari Folman : s

plendide. Dès les premières images, on est en prise avec quelque chose d'hyper ... quoi ? réaliste ? Ces chiens ont une présence stupéfiante, ils sont plus vrais que vrais, vrais comme un cauchemar.

Le ton est donné : c'est un film qui montre ce qu'on ressent en direct avec ses tripes, ça a à voir avec l'émotion, la peur, ça a l'intensité de ce qu'on ressent en rêve. Mais c'est aussi précis que ce qui est analysé avec l'intelligence, le regard et l'intelligence du regard. Cerveau droit, cerveau gauche, même combat. Et c'est un regard encore plus fort que celui d'une caméra, puisque les images sont données pour telles, traitées en dessin et peinture : la précision du trait, l'intelligence des ombres et des couleurs, avec des dominantes de gris, d'ocres, bruns et jaunes, c'est tantôt hyperréaliste, tantôt hyper onirique, c'est tantôt d'une hypersimplicité, qui gomme le détail pour montrer l'essentiel et souligner l'hypercomplexité de ce que l'âme ? l'esprit ? l'intelligence ? la sensibilité ? l'oeil enregistre / fabrique pendant que se déroule la séquence ordinaire des faits de guerre. La peur, l'angoisse, l'attente, le suspense, l'insouciance, la mort, la stupéfaction, la boucherie, l'horreur, la folie, la banalité, l'absurdité de la guerre. C'est aussi un regard sur le point de vue, les points de vue, le regard collectif, la mémoire personnelle, la mémoire des autres, les interactions du temps et du discours. Certaines scènes (la plupart des scènes) sont d'une beauté stupéfiante et d'une puissance confondante. On est scotché. Et quand on en sort, on est en manque : en manque d'intensité, parce que l'auteur vous a fait côtoyer l'essentiel pendant une heure.


Les 7 Jours : israëlien /

Le deuil dans une famille israëlienne. Conflits


Les Murs porteurs : h

istoire de famille française, gentil. Si je n'avais pas noté, j'aurais oublié que je l'avais vu.


3 Petites cochons, canadien : s

urvendu par un critique-radio., mais c'est pas mal, 3 frères, leur mère dans le coma, l'évocation des diverses facettes du désir, couple, sexualité. Bien vu, rien de bouleversant.


Gomorra, italien, .... : l

ugubre, sordide, excellent (reportage ?) sur la gangrène mafieuse, qui s'attaque à tout : trafics, jeu, femmes, déchets, couture... Rien de glamour, rien de sexy, rien que la vision d'une humanité de la zone, "obligée" d'entrer dans un quelconque rouage de la "famille".


La Princesse du Nebraska, Wayne Wang :

Euh... ça a failli être très bien, la peinture d'une jeune fille chinoise et passive, lente et moderne, au moi mal dégrossi, qui se pose la question cruciale : comment vivre ? en américaine ou en chinoise ? en mère ? en pute ?en vendant son bb ? en homo ? en étudiante ? L'auteur abuse des gros plans et des effets de caméra attardés dans des angles improbables ; aperçu de divers types de Chinois en Amérique. Elle a surtout l'air très seule, et n'est (r)attachée à rien.


Le Silence de Lorna, les frères Dardenne : s

ombre histoire, comme d’hab avec les Dardenne. Ce qui est bien, c’est la manière de faire passer le spectateur d’un regard extérieur posé sur cette fille, Lorna, et sa manière d’être avec le monde (son mari, son « agent » albanais, son fiancé albanais, loin aussi, etc) à un regard intérieur : comment elle intègre une autre dimension d’elle-même et de l’autre. C’est simultané ; qd elle voit l’autre, elle commence à se voir et à agir, plutôt que d’être agie par les hommes (les « virils »). C’est prenant et poignant.


La Cité des jarres, islandais : p

ourquoi faut-il aller voir La cité des jarres ? Parce qu'il y a les ingrédients d'un polar, avec meurtre et enquête, parce que sur un vieux fond de méchants, de flics véreux et de sales types qui exercent un sale pouvoir sur ce qu'il y a de plus faible qu'eux, le contexte est déroutant - qui connaît l'Islande, ses villes, ses banlieues, à vrai dire, tout a l'air d'être une banlieue, et pire encore, un non lieu - parce qu'il y a des flics, des bagnoles de flics, des accélérations, des enlisements et des temps neutres, bizarres, parce qu'il y a des poursuites qui ne ressemblent à rien de connu, comme cette poursuite sur une sorte de lande/dune battue au loin par le ressac, parce qu'il y a des humains trop humains, et d'autres qui sont franchement des ordures, parce que c'est pas beau et que rien n'est fait pour dorer la pilule, ce serait plutôt le contraire, parce que sous des dehors franchement ordinaires, c'est une peinture assez crade de la fatalité et du tragique de l'existence qui vous joue des tours de sagouin.


De l'Influence des rayons gamma sur le comportement des marguerites, Paul Newmann :

bien, très bien, personnage de la mère médiocre, des deux filles, intéressant humain et sociologique; poignant, tant de bêtise égoïste et veule chez la mère.


Mamma Mia : sympathique.


Mensonges d'état, Ridley Scott : de l'action et de vilains islamistes.


There will be blood, Paul Thomas Anderson : f

ilm fascinant et génial sur un prospecteur de pétrole (Daniel-Day Lewis) qui rafle toutes les concessions locales et devient le plus puissant. Confrontation avec le prédicateur.