jeudi 25 février 2016

Steve Jobs

Danny Boyle. Le film montre comment Steve Jobs (Michael Fassbender) a manifesté toute sa vie une volonté forcenée de plier l'informatique à sa vision du monde (et apparemment, il avait raison). Quitte à plier, au passage, ses acolytes de toujours. Et à manifester un mépris absolu de la dimension humaine de quoi que ce soit : du projet entrepreneurial au fait d'être père. De même qu'il avait une volonté forcenée de ne voir de la réalité que ce qui lui convenait. Bref, c'est un sale type, profondément antipathique qui a révolutionné l'informatique et digitalisé les relations humaines. J'ai lu par ailleurs que cet ascète végétarien a subi cancer du pancréas et greffe du foie avant d'être emporté par ses cancers avant 50 ans. Comme quoi.

M (Joseph Losey)

Un remake du M de Fritz Lang, par Joseph Losey. Le titre allemand était : M – Eine Stadt sucht einen Mörder = (toute) Une Ville cherche un meurtrier. Traduction française : le Maudit (pour Murderer, ou Morder).
Un tueur d'enfant en est à sa sixième victime et met la police sur les dents. Mais elle patine, et ce n'est pas bon pour le business de la pègre. Leur boss décide donc de mettre son réseau en action pour pister le meurtrier.
Qu'est-ce qu'il y a de si efficace dans ce film ? La narration limpide ? L'efficacité des scènes, avec de belles séquences solides, bien narrativees, bien cadrées (le prédateur chez le cireur de chaussure qui repère sa proie / l'attente de la mère dans sa cuisine, puis la cage d'escalier et la course à l'extérieur de l'immeuble / les fausses pistes et le soupçon qui s'abat sur chaque type accompagné d'une petite fille/ le psychopathe chez lui/ la géniale scène de la poursuite dans la rue jusqu'à cet immeuble incroyable (une galerie commerçante sur plusieurs étages, avec une formidable architecture de rampes, de coursives en fer forgé, et de cage d'ascenseur). A partir de cette poursuite, la tension ne redescend pas un instant, avec une succession de plans plus haletants et graphiques les uns que les autres, jusqu'à cette somptueuse scène finale où toute une foule est rassemblée dans un parking pour l'hallali. Magnifique monologue de l'accusé (David Wayne) pour explique sa pathologie face au "tribunal populaire" (aussi intéressant que celui de Peter Lorre dans le même scène). Et magnifique plaidoyer de l'avocat. C'est du très bon cinéma policier/drame psy, un sans faute captivant, où on est pris en main et magistralement conduit tout au long de l'histoire jusqu'au puissant dénouement.
Dans la foulée, je suis allée voir l'original, celui de Fritz Lang en 1932 (1h52). A mon avis, malgré ce que j'ai pu lire,  celui de Losey tient largement la route. (En fait, j'avoue, c'est une hérésie, malgré tout, j'ai préféré celui de Losey).

mardi 23 février 2016

Un Jour avec, un jour sans. Hong Sang-Soo.

C'est ce genre de film où il ne se passe pas grand chose, d'ailleurs, ça se passe pendant une journée vide, une journée à tuer le temps, parce que le personnage, un réalisateur en vue invité en province à une conférence sur son film, est arrivé de Séoul un jour trop tôt. Les personnages (en l'occurrence deux artistes - il est réalisateur accompli, elle est peintre débutante - donc, des personnes sensibles et complexes) se rencontrent par hasard,  s'approchent, s'évaluent, se séduisent entre deux phrases, deux regards, deux demi-sourires ? Des connivences qui se devinent, des accointances qui s'esquissent, des baisers qui s'évitent. Bref, ils sentent qu'ils pourraient se plaire, s'entendre, voire s'aimer. Mais la vie est trop directe et trop simple pour des âmes compliquées. Trop compliquée pour l'épanouissement du désir. Donc le film laisse plein de choses en suspens, du flou sur ce qui se joue vraiment dans chaque scène. Et le fait avec une subtilité qui va de pair avec une certaine lenteur. Ce qui peut aussi être bien.
Mais tout ce flou laisse la place à d'autres hypothèses. Du coup, c'est l'effet 2 en 1 : quand on croit que c'est fini, (et qu'on est un peu sur sa faim) le film rembobine et reprend au point de départ. Tout ce qui a été montré sous un angle l'est à nouveau, sous un autre angle. Bonne idée pour montrer d'autres possibles qui naissent d'une rencontre, le potentiel d'un instant, d'une réplique, d'un échange.  Mais finalement, c'est toujours non abouti et frustrant. Et long.
A quoi s'adresse le tas d'étoiles décernées par la plupart des critiques ? A la finesse du réalisateur ? Son intelligence. Sa subtilité pour faire sentir l'épaisseur et la fragilité d'un instant ? Soit. Mais dans l'ensemble, c'est quand même un peu chiant.

lundi 22 février 2016

Les Tuche

Olivier Baroux. Début laborieux, j'ai maugréé, et puis je me suis laissé faire. J'ai découvert Jean Paul Rouve. Il est parfait, et subtil me semble-t-il, dans un rôle pareil. Ma préférée, après JP Rouve, c'est la mamie et son sabir : la rencontre avec les Indiens est hilarante, j'aime bien aussi le fils aîné, au profil improbable (j'aime bien sa brève rencontre avec les gangsta rappers, et quelques autres de ses apparitions). Il y a quelques gags pas très fins (le benedicite dans la famille américaine, par exemple) mais qui font sourire. Des petites trouvailles. Quelques belles images (la route, Las Vegas) Et la morale est sauve : face aux gros méchants capitalistes américains, qu'est-ce que c'est bien d'être  un bon plouc de France avec les vraies valeurs de la famille.

vendredi 19 février 2016

Les Innocentes

Anne Fontaine. L'histoire d'un couvent en Pologne, les Allemands sont passés par là, puis l'armée Rouge. La guerre est à peine finie, la zone est maintenant contrôlée par les Soviétiques. Il s'ensuit qu'un certain nombre des bonnes sœurs violées vont accoucher "par effraction" dans la honte, le silence, le déni, et la souffrance. Car la "mère supérieure" du couvent maintient l'ordre de Dieu dans sa maison, jusqu'à ce qu'une bonne sœur, plus humaine et touchée par la souffrance de ces femmes, appelle au secours une jeune infirmière de la Croix Rouge. D'où le désordre consécutif à l'introduction d'un élément étranger dans la clôture du couvent. (Les vocations, la foi, le statut de fiancée de Jésus, ou épouse du Seigneur, tout vacille).
C'est bien fait, tout est là où il faut comme il faut. C'est affreux, poignant etc. Mais il manque quelque chose pour que ce soit plus qu'un bon film (avec une très belle photo) qui raconte bien une histoire.

45 ans

Andrew Haigh. Où il est prouvé qu'il est chiant de vieillir. Et que Charlotte Rampling s'en tire bien, toujours élégante. Mais tout ça, on le savait déjà. Là-dessus, une intrigue bien mince  : le cadavre du premier amour de son mari, perdu en montagne, a refait surface quelque part en Suisse. Ce simple fait suffit à perturber les fondements de 45 ans de vie commune. Pas très crédible. Tout le film se déroule avec des notes assez délicates, et reste passablement ennuyeux.

jeudi 11 février 2016

Anomalisa


Charlie Kaufman. Le titre est la seule chose bien du film. Survendu par les critiques, qui décernent des tas d'étoiles à ce machin glauque et sans surprise. C'est l'histoire de la solitude d'un conférencier à succès, fatigué de l'ennui de sa vie dans un monde mécanisé (son livre vend les codes de comportement dans ce monde là). Il débarque dans son hôtel, tout sonne faux, sauf qu'il voudrait bien tirer un coup. Ça rate avec une ex, ça se fera avec Anomalisa.  Ou comment il va faillir y avoir une étincelle de quelque chose. Le "truc" du film, c'est que les rôles sont endossés par des figurines. Comme si ça suffisait à rendre le film intéressant. C'est juste un tissu de clichés.

mercredi 3 février 2016

Wilfredo Lam au Centre Pompidou


Né à Cuba de père chinois et de mère hispano-africaine

Wilfredo Lam 1


L'incroyable liberté d'une âme où coexistent ...

D'étranges cérémonies. Des rituels. Des figures hiératiques. Des énigmes à figure animale ou humaine. Des lumières végétales. L'impression d'assister à un cérémonial où un homme, penché sur son âme bruissante de mythologies et de contes, écoute ce qu'elle raconte et exhume leur mémoire perdue. (Cf tableau Hors mémoire).
Il scrute. Il épluche. Il assemble. Ecartelements. Duplications. Répétitions. Il établit d'étranges corrélations et accomplit des métamorphoses. Il invente des kyrielles, des mélodies, des ribambelles. Des communions secrètes. L'incroyable liberté d'une âme où coexistent les animaux. Les dieux. Les marécages. Les forêts. Se laisser gagner par cette profusion. Ces incantations. Ces délibérations. Ces bacchanales d'un genre inouï. Qui chantent la jungle, la femme, la lune. Les divinités perdues. Enfouies. Englouties dans la mémoire de la terre et de l'homme.
 Et puis de périlleuses chorégraphies sur le fil du rasoir. Des affrontements, des fuites. Des perplexités. Des effrois. Des conciliabules. Des rémissions. Des pavanes. Des sarabandes.
 Confrontations. Dénégations. Incantations.
 L'âme en roue libre batifole avec un inconscient farceur. Plein de fantaisie et de cruauté. D'allitérations et de répétitions. De rires et de cris d'animaux.
 Des formes s'inventent et se délitent. S'enfouissent et se réfléchissent. C'est exubérant. Proliférant. Extasiant. Intriguant. Polymorphe et magique.


Wilfredo Lam 2

Son âme bruissante de mythologies et de contes

Il accomplit des métamorphoses
Des énigmes à figure animale ou humaine
Des perplexités. Des effrois. Des conciliabules