mercredi 31 janvier 2024

Iron claw

Sean Durkin. L'histoire des frères Von Erich, stars du catch professionnel des années 70-80. C'est riche, compliqué, impitoyable, trop humain. Les frères, 4 au départ (et même 5 à l'origine) évoluent sous la férule impitoyable de leur père, façon sergent instructeur, qui a  raté je ne sais quel titre dans sa carrière,  malgré sa prise imparable et très spéciale "iron claw". Il le fera payer à ses fils en les entraînant à la dure, impitoyablement soumis à l'injonction de réussir ce que leur père a raté. Ça se passe au Texas, c'est hyper viril et testéronné, discipline militaire, soumission idem. C'est le gagne-pain de la famille. La mère, hypercroyante, à la fois forte et transparente est là pour les nourrir, mais pas les protéger. Dieu y pourvoiera, du haut de son immense amour. Sauf que Dieu a des éclipses et les frères vont aller de tragédie en tragédie, poursuivis qu'ils sont par la "malédiction". Ils s'en tirent par la fraternité : ils sont incroyablement soudés et loyaux l'un à l'autre,  malgré ou grâce à l'éducation de leur père toxique qui ne les voit qu'à travers ce qu'ils représentent dans le catch. (Ou la lutte? Je devrais me renseigner sur les rapports entre les deux). C'est riche et complexe, ça mérite vraiment d'être vu. Une belle bonne tranche d'humain bien saignante. Les amateurs de catch doivent voir en plus un tas de trucs qui m'échappent. 

mardi 30 janvier 2024

Les Chambres rouges

 A éviter. Est-ce un mauvais film ou simplement un film artificiel et prétentieux avec plein de passages inutiles (pour meubler ? Pour parfaire le portrait de la Parfaite ?) Cette femme un peu mystérieuse avec ses airs hautains de top-model et ses talents de hackeuse, joueuse en ligne et navigatrice du web, y compris dark, on se dit bien vite qu'elle a  quelque chose derrière la tête, à assister au procès d'un tueur en série psychopathe, vendeur sur le dark web  de ses films d'horreur sadique sexuelle. Cest ça,  les chambres rouges : des espaces très cryptés sur le web pour visionner ce genre de choses. S'ensuit ce qui doit s'ensuivre, avec une relative ambiguïté sur les buts poursuivis par la hackeuse. Bref, cest trop long et très inutile. On s'ennuie. Et on se demande à quoi sert le personnage de la groupie du tueur, persuadée qu'il est innocent et victime d'un méchant complot, et que la Parfaite prend provisoirement sous son aile.

lundi 29 janvier 2024

May December



Todd Haynes. L'actrice Elizabeth (N.Portman) va interpréter le rôle de Gracie (Julianne Moore), la femme du scandale d'autrefois (relation sexuelle avec un mineur qu'elle a épousé après avoir fait de la prison et avoir accouché en prison). En arrivant chez Gracie pour nourrir son personnage, que cherche-t-elle ? Du croustillant ? Du trash ? Hélas, elle tombe sur une femme équilibrée et mère épanouie (Julianne Moore). La force de Gracie, c'est une forme de naïveté et l'authenticité de celle qui ne doute pas. De son amour, de son couple, de sa vie. Du barbecue aux saucisses le dimanche entre amis. La faiblesse de l'actrice, c'est qu'elle n'a rien de tout ça. Elle va donc essayer de comprendre cette histoire à l'aune de ses propres critères pour débusquer ce qui pourrait clocher sous le vernis (la fidélité du jeune mari ? Une forme de prédation à l'origine du couple ? Une lassitude de l'homme jeune encoconné 20 ans plus tôt et qui aimerait peut-être devenir papillon ?) Bref elle entre dans la peau d'une Gracie fantasmée en femelle prédatrice (vs femme murissante follement amoureuse) et vampirise Gracie pour composer un personnage différent, plus proche d'elle-même que de Gracie. La scène finale filme le résultat : le tournage de la scène de séduction du gamin montre une Gracie/Elizabeth plus perverse et prédatrice qu'amoureuse, plus Elizabeth que Gracie. Gracie est trahie (encore une fois). Elle aurait dû se méfier en voyant Elizabeth arriver en même temps qu'un colis de merde sur son paillasson, et en la trouvant plus petite qu'à l'écran.

Tout cela est louable, la critique s'enthousiasme de l'exceptionnelle performance des actrices (même si N. Portman en fait trop), mais ça reste un peu fastidieux pour ne pas dire chiant. Peut-être que si le film n'avait pas été précédé d'un tel concert de louanges, j'aurais mieux apprécié ?

mercredi 17 janvier 2024

Poor Things, Pauvres créatures

 Yórgos Lánthimos. Par chance je n'avais rien lu susceptible de spoiler l'intrigue, jai donc découvert cette histoire folle sans savoir du tout à quoi m'attendre et ça n'en a été que plus plaisant de savourer cette avalanche de rebondissements. (Quoiqu'un peu trop gore au debut). C'est un film d'apprentissage, où une jeune femme née du désir d'expérimentation de son créateur - elle l'appelle God - se construit sans interdit et sans complexe, libérée des exigences de la pensée et morale dominantes. C'est un plaisir foisonnant d'images, de rebondisssements et de décors ébouriffants. C’est drôle, irrévérencieux et tonitruant,  d'un mauvais goût absolu et réjouissant, plein de pieds de nez à l'outrecuidance masculine et aux clichés sur le sexe et la femme. Ni le genre humain ni l'homme n'en sortent grandis, pauvres créatures. 

dimanche 14 janvier 2024

Priscilla

Sofia Coppola. Priscilla était elle sous emprise ? Tombée à 14 ans sous le charme d'Elvis, un vertige, un rêve, un ravissement... c'est elle qui a le Graal, pendant que les groupies attendent dehors. Mais n'est-ce pas une baby-doll que Presley s'est offerte pour jouer à la maison, tandis que sa vraie vie est ailleurs. La prisonnière de Graceland tourne en rond et s'ennuie dans un décor somptueusement hideux. Et le Graal finit par révéler son vide, vide qu'elle n'arrive même pas à combler tellement il ne la voit pas. C'est son épouse-et-mère point final. Comme un ancrage nécessaire et transparent. Ce n'est pas déplaisant de déambuler avec Priscilla dans ce vide spectaculaire, décor, coiffures, costumes, tout est parfait, mais quel vide, quel ennui, quelle tristesse.


vendredi 12 janvier 2024

Perfect days etc


Wim Wenders, Perfect days : le sage des toilettes ou l'humanité d'un personnage éveillé à lui-même et à la vie. Une histoire de pleine conscience appliquée à toutes les dimensions de sa vie : son métier de nettoyeur de chiottes en deviendrait presque poétique, élevé au niveau d'un artisanat du geste bien fait et du travail bien accompli. (On comprend pourquoi les toilettes sont si géniales au Japon.) Il ne se passe rien que le quotidien, jour après jour, du réveil au coucher, comme un rituel où s'égrènent petit déjeuner, soin des plantes, départ au boulot, pressing, repas, bain public, lecture, musique (que du bon, et en cassette, il ignore les technologies qui le brancheraient sur le bruit du monde), photo (en argentique) et quelques irruptions de l'autre qui intègre (ou effleure ?) sans le déranger son univers ordonné. Aimable tranche de "fil du temps". 

Past lives, Celine Song : Nora et Hae Sung, coréens, une douzaine d'années, et un très fort lien d'amitié. Ou d'amour d'enfance. La famille de Nora émigre au Canada. A 20 ans, le hasard (facebook) les reconnecte, brièvement. A 30 ans, ils se retrouvent, adultes, confrontés à ce qu’ils sont devenus et ce qu'ils auraient pu devenir s'ils avaient continué à grandir ensemble. Pourquoi pas. Tout ça reste léger (ou subtil) comme l'esquisse de ce qui aurait pu être ou ne pas être. Le fil ténu du hasard ou de la nécessité. 

Winter break, Alexander Payne. Aimable réflexion sur trois solitudes dans un collège américain au moment de Noël. Un élève,  un professeur, la cantinière. Rien de très nouveau, mais une certaine grâce à harmoniser les détresses de ces trois là.

vendredi 5 janvier 2024

L'Innocence / Monster

Hirokazu Kore-eda. Encore une bizarrerie de traduction du titre (monster en japonais et en anglais). L'innocence est une mauvaise idée, puisqu'il est surtout question de monstres (et éventuellement d'innocence), mais qu'ils ne sont pas forcément là où on les attend. Kore-eda nous emmène sur des fausses pistes au fil de trois narrations, dégommant au passage certaines monstruosités (notamment la couardise et l'hypocrisie du système éducatif -directrice en tête-  face à un possible scandale, la violence d'un père abusif...). Il y a le regard de la mère protectrice sur son fils chéri,  puis le regard du professeur sur ses élèves. Le dénouement, c'est quand les regards se mettent à leur juste hateur, celle des deux "monstres" : la troisième narration réajuste et revisite correctement qui a été montré auparavant. Belle histoire intelligente, peut-être un peu trop cérébrale.