Ce que je trouve
fascinant dans l'expo Raw Vision c'est de pénétrer dans l'intimité de ces
artistes et de les voir aux prises avec leurs images, leurs phantasmes, leurs
voix, leurs obsessions. La pénombre de l'expo bruisse de leurs voix, de la
rumeur sourde de toutes ces âmes en quête d'elles-mêmes, de leur vérité. De
leur nature. Dans le détail, il y en a un certain nombre qui ne m'intéresse pas
vraiment, mais dans leur ensemble, elles deviennent fascinantes, parce qu'elles
participent toutes, d'une certaine façon, d'un appétit de (vivre ?). Vivre en
phase avec sa vérité intime. Vivre l'essence de son être dans sa relation au
monde. Même s'il y en a un paquet qui sont autistes ou schizophrènes. Qu'importe.
Ils ont eu la force de ne pas se laisser
museler par l'ordre du travail, de la vie à crédit et de la rentabilité. Force
d'inertie. Ou résistance. Ou faiblesse. Ou incompétence. Ils étaient trop
faibles, trop illettrés, trop nuls, trop peu dociles pour se faire enfermer.
Inadaptés. Laissés pour compte. Ils sont restés prisonniers (?) de la liberté
de leur être. D'ailleurs, un certain nombre a séjourné à l'asile ou en prison. Ils
n'ont rien fait de constructif ou d'utile. N'ont apporté aucun progrès à
l'humanité. Sauf celui de renouer avec l'imaginaire, l'inconscient, les
archétypes, leur voix personnelle dans l'universel.
C'est amusant de regarder
en contrepoint l'exposition Le Mur, de la collection d'Antoine de Galbert. Il
y a quelque chose du même ordre qui en ressort, mais comme inversé, filtré par
la vision et le choix du collectionneur. Plus fragmenté et plus dilué puisqu'il
y a beaucoup plus d'artistes exposés, et que la plupart ont une seule œuvre
exposée. C'est moins intense, et moins intime, il n'y a pas cette impression de
frénésie, de folie et d'urgence qu'il y avait dans Raw Vision. Mais c'est une belle
balade avec des rencontres éphémères et des surprises, et aussi des
propositions anecdotiques ou gag-esques sur lesquelles le regard glisse avec
distraction. Mais aussi des immersions dans d'horribles visions, des
réminiscences, et aussi du blabla et des propositions qui laissent indifférent.
Il reste le plaisir de flâner dans le monde du collectionneur, avec ses
engouements, ses passades, son humour, ses spéculations, et aussi son plaisir
d'enfant gâté qui se promène chez les artistes en disant je veux ça, et ça, et
aussi ça.
Le dispositif du clic est
à la fois rigolo et fastidieux, j'aimerais bien avoir accès au système qui enregistre
le nombre de clics par œuvre, et aussi enregistrer des balades individuelles,
et dresser quelques portraits de visiteur à travers leurs clics, et aussi le
portrait des best of de la collection, via l'ensemble des clics distribués.
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