vendredi 22 août 2014

Raw Vision vs Le Mur




Ce que je trouve fascinant dans l'expo Raw Vision c'est de pénétrer dans l'intimité de ces artistes et de les voir aux prises avec leurs images, leurs phantasmes, leurs voix, leurs obsessions. La pénombre de l'expo bruisse de leurs voix, de la rumeur sourde de toutes ces âmes en quête d'elles-mêmes, de leur vérité. De leur nature. Dans le détail, il y en a un certain nombre qui ne m'intéresse pas vraiment, mais dans leur ensemble, elles deviennent fascinantes, parce qu'elles participent toutes, d'une certaine façon, d'un appétit de (vivre ?). Vivre en phase avec sa vérité intime. Vivre l'essence de son être dans sa relation au monde. Même s'il y en a un paquet qui sont autistes ou schizophrènes. Qu'importe. Ils ont eu la force de ne  pas se laisser museler par l'ordre du travail, de la vie à crédit et de la rentabilité. Force d'inertie. Ou résistance. Ou faiblesse. Ou incompétence. Ils étaient trop faibles, trop illettrés, trop nuls, trop peu dociles pour se faire enfermer. Inadaptés. Laissés pour compte. Ils sont restés prisonniers (?) de la liberté de leur être. D'ailleurs, un certain nombre a séjourné à l'asile ou en prison. Ils n'ont rien fait de constructif ou d'utile. N'ont apporté aucun progrès à l'humanité. Sauf celui de renouer avec l'imaginaire, l'inconscient, les archétypes, leur voix personnelle dans l'universel.
C'est amusant de regarder en contrepoint l'exposition Le Mur, de la collection d'Antoine de Galbert. Il y a quelque chose du même ordre qui en ressort, mais comme inversé, filtré par la vision et le choix du collectionneur. Plus fragmenté et plus dilué puisqu'il y a beaucoup plus d'artistes exposés, et que la plupart ont une seule œuvre exposée. C'est moins intense, et moins intime, il n'y a pas cette impression de frénésie, de folie et d'urgence qu'il y avait dans Raw Vision. Mais c'est une belle balade avec des rencontres éphémères et des surprises, et aussi des propositions anecdotiques ou gag-esques sur lesquelles le regard glisse avec distraction. Mais aussi des immersions dans d'horribles visions, des réminiscences, et aussi du blabla et des propositions qui laissent indifférent. Il reste le plaisir de flâner dans le monde du collectionneur, avec ses engouements, ses passades, son humour, ses spéculations, et aussi son plaisir d'enfant gâté qui se promène chez les artistes en disant je veux ça, et ça, et aussi ça.
Le dispositif du clic est à la fois rigolo et fastidieux, j'aimerais bien avoir accès au système qui enregistre le nombre de clics par œuvre, et aussi enregistrer des balades individuelles, et dresser quelques portraits de visiteur à travers leurs clics, et aussi le portrait des best of de la collection, via l'ensemble des clics distribués. 

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