Bergman 1973. Ah, le beau Bergman bien sombre et noir, avec du rouge
sang, rouge de fureur, de frustration, d'aveuglement, de douleur, de
pessimisme. Un Bergman ciselé, taillé au cordeau, impeccable et
implacable où les relations humaines sont découpées au scalpel,
impitoyablement décapées, les fioritures sociales balayées, rien que du
dense venu du tréfonds des noirceurs de l'âme. Il fouille la pourriture
et la décomposition de l'âme, la putréfaction des relations humaines
derrière la bienséance bourgeoise. Tout vacille, tout se fracture, tout
se délite et le doute suprême atteint même le pasteur.
C'est
d'un pessimisme absolu, ça parle d'oppression, de souffrance, de
solitude, de mensonge, de faux-semblant, de jalousie, de culpabilité, et
tout ça remonte à la nuit des temps, c'est à dire à l'enfance - même
l'enfance n'est pas innocente - et se distille tout au long de ces vies
entravées et muselées. Sauf Anna, la servante, la subalterne, la sans
parole, opaque, humaine, aimante, servante et serviable. (Muette, mais
moins muselée).
Et
à la fin du film survient ce contrepoint stupéfiant, le point de vue de
la malade, d'après son journal, qui livre une vision du monde et de ses
sœurs, étonnamment paisible, voire harmonieuse. Est-ce une vision
d'avant la déchéance de la maladie, ou de l'aveuglement d'une femme, ou
la supériorité d'une femme qui avait peut-être accès à l'amour ?
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